Bourscheid
Histoire courte
Selon des ouï-dire, la « villa Burscheid » existe depuis 2000 ans. Ainsi, des descendants d’anciens colons romains se seraient installés sur les collines entourant le fortin en bois présumé. Cependant, bien que des vestiges d’habitations humaines des époques néolithique et romaine aient été dégagés à Bourscheid et aux environs, l’origine du village ne remonte qu’au 7e ou 8e siècle de notre ère. Quand les vallées fertiles et facilement abordables étaient déjà peuplées, voire surpeuplées, alors des prospecteurs courageux s’aventurèrent dans l’épaisse forêt ardennaise pour s’y fixer au bord d’un ruisselet dans une clairière dégagée par le feu à laquelle ils donnèrent le nom de BOURSCHEID, c’est-à-dire bour = du latin burere/brûler et -scheid = du celtique clairière avec de l’eau.
Au lieu de fortifier leur village par des remparts en palissades renforcées de pierres, comme c’était l’habitude, ils construisirent un camp retranché (Fluchtburg) sur un éperon rocheux formant promontoire à mi-chemin entre leur village et la vallée de la Sûre par où pouvaient arriver des ennemis/bandits auxquels ils barraient ainsi le chemin.
Déjà les Normands ou Vikings avaient incendié Trèves en 882 et avançaient vers Metz, tout en sillonnant la campagne le long des affluents de la Moselle. Sous cette menace, le camp retranché de Bourscheid (Burgknapp) fut vite muni d’un fortin en bois entouré d’une forte enceinte de palissades. Ainsi ce fortin construit à l’époque des France saliens marque l’origine du château fort de Bourscheid, comme le prouvent les fouilles archéologiques commencées dans les années 1970.
Cette construction fut vite remplacée par une fortification en pierres, de sorte que vers 1100 Bertram de Bourscheid est cité avec son château extrêmement fortifié. Ce Bertram, qui avait pris le nom de Bourscheid peu auparavant, forma aussi une seigneurie de plusieurs villages autour du château.
A l’époque, le seigneur du château était niché au milieu de ses nombreux serfs. Chaque sujet a dû assumer toute tâche possible, tel que monter la garde au château, participer à toute conflit ou combat pour défendre son seigneur, labourer les terres à la charrue, approvisionner le château de foin et de bois, aider à construire des bâtiments, donner la dîme….
Il est difficile de chiffrer le nombre d’habitants appartenant au château et ses alentours. Conformément à des documents, les prestations et tâches des villageois autour du château étaient bien définies. De l’année 1485 nous savons que 13 maisons de Michelau ont dû contribuer la dîme en seigle et en avoine, des poules, des oies, des œufs, du bois, du vin, travailler pendant 2 fois 13 jours pour le seigneur de Bourscheid. Plus tard, parmi les fournisseurs du château comptaient plusieurs maisons de Bourscheid, 20 maisons de Michelau, 20 maisons de Hoscheid, 5 de Kehmen, 12 de Holzthum, 7 maisons de Bürden, des fournisseurs d’Asselborn, de Diekirch, d’Erpeldange, de Gralingen, de Heisdorf et d’Ettelbruck.
Le régime féodal prit fin au Duché de Luxembourg par l’arrivée des troupes françaises en 1794-1795. Le village de Bourscheid devint le siège d’une mairie. La commune de Bourscheid n’a cessé de se développer pour atteindre sa dimension d’aujourd’hui comptant 8 villages avec leurs lieux-dits: Bourscheid (Bourscheid-Moulin, Fischeiderhof); Kehmen; Scheidel; Lipperscheid (Bourscheid-Plage, Lipperscheid-Delt); Michelau (Closdelt, Enteschbach, Flébour); Schlindermanderscheid (Friedbusch); Goebelsmühle et Welscheid (Windhof, Baumhof). Environ 1700 habitants répartis sur environ 680 ménages habitent dans la commune d’une superficie d’un peu plus de 36 km2 dans le canton de Diekirch.
Aux XVIIe et XVIII sièvles la commune de Bourscheid était dominée par les espaces boisés dans les vallées et les terres cultivées sur les plateaux, de nombreux marécages ainsi qu’un réseau important de rivières et de ruisseaux. Aux abords des villages on trouvait des potagers limités de haies. Ces paysages ont été complètement conservés. A cette époque, les ensembles bâtis les plus importants étaient Michelau, Welscheid, Schlindermanderscheid et le château de Bourscheid. Lipperscheid et Scheidel ne comprenaient qu’une ou deux fermes. A noter que Welscheid était l’une des localité les plus peuplés alors que Kehmen et Schlindermanderscheid étaint des villages de taille assez importante, étendus le long des axes routiers. Comparé à d’autres villages, Bourscheid était relativement peu développé avec ses deux noyaux bâtis, l’un au carrefour entre les actuelles Burewee et Brémechterpad et l’autre autour de l’élise.
La commune de Bourscheid a vu fondre sa population durant plus d’un siècle, de 1851 à 1981. Cette chute vertigineuse de 1027 habitants entre 1851 et 1981 est due principalement aux conséquences des mutations économiques: les mouvements d’émigration, l’essor industriel à la fin du 19ème siècle, suivi de l’exode rural. Depuis 1981, la croissance de la population est à nouveau positive. Au 1er janvier 2019, la commune comptait 1715 habitants, soit un accroissement de la population totale de Bourscheid de 26,5% entre 2009 et 2019. La faible densité de 46,6 habitants par km2 s’explique en prenant en considération la grande étendue du territoire de Bourscheid (36,86 km2). Un accroissement de la population est dû principalement au solde migratoire positif avec une population étrangère en constante augmentation, mais qui reste en dessous des moyennes cantonale, régionale et nationale.
Le Château
à travers les siècles
Bertram de Bourscheid est donc identifié comme étant le premier seigneur de Bourscheid. Le château et la seigneurie y attachée ne prirent leur véritable essor qu’à partir de 1233 lorsque la comtesse Ermesinde, en train de former le territoire du comté/duché, donna en fief le château à Sohier de Wavre pour le garder contre le comte de Vianden. Sohier prit immédiatement le nom de Sohier de Bourscheid, mais garda ses armes héraldiques d’argent à trois feuilles de nénuphar de gueules, qui devinrent les armes de Bourscheid.
Sohier et ses descendants, seigneurs de Bourscheid et de Stadtbredimus, étaient des vassaux fidèles des comtes puis ducs de Luxembourg et des archevêques-électeurs de Trèves. Ainsi Frédéric de Bourscheid accompagna l’Empereur Henri VII (de la Maison de Luxembourg) et son frère Baudouin, archevêque de Trèves, à Rome en 1311; Marsilius était Justicier des Nobles de Luxembourg de 1379 à 1394, Bernard 1er obtint des charges à la Cour des ducs de Juliers e même temps qu’il était un des personnages les plus brillants aux Cours des ducs de Luxembourg et des Princes-électeurs de Trèves et de Mayence, tout en remplissant des missions militaires et diplomatiques au service de l’Empereur romain. Malheureusement, cette lignée créée par Sohier 1er s’éteignit au Duché de Luxembourg avec Bernard IV qui décéda en 1512 sans laisser d’hoirs.
Bourscheid échut alors aux fils des deux sœurs de Bernard qui gardaient la seigneurie en indivision, mais qui prirent des domiciles distincts au château, les Metternich s’installèrent dans l’ancien demeure de la seigneurie Bourscheid près du Palais et du donjon, les Zand de merl établirent leur quartier un étage plus bas près du four alors que les Ahr d’Antweiler prirent leur logis encore plus bas dans l’ancienne maison castrale dite maison de Stolzembourg. De cette façon les différents degrés de noblesse étaient bien respectés.
Cette situation était dangereuse du point de vue militaire, le seul comptant pour le château. En achetant leur part aux Ahr en 1616 et aux Zand en 1626, la famille de Metternich devint uniques propriétaire de la forteresse. Il en résulta l’époque la plus glorieuse de l’histoire de Bourscheid. Lothaire-Frédéric de Metternich-Bourscheid devint Prince-évêque de Spyre, évêque de Worms et archevêque-électeur de Mayence. Son frère Wolfgang-Henri, baron depuis 1664, fut Justicier des Nobles, Maréchal héréditaire au Duché de Luxembourg et Grand Maréchal de Cour de l’Electeur de Trèves (entre autre). Il avait acquis en fief plusieurs seigneuries aux bords de la Moselle, de sorte qu’il demeurait plutôt à Dodenbourg ou à Bruch tout en vivant souvent en son palais de Trèves, à Wittlich ou à Coblence, sans délaisser sa maison de Luxembourg. Avec son épouse, la Baronne de Schönborn, issue d’une des familles nobles rhénanes les plus illustres, il était au premier rang de la noblesse de ces territoires. Hélas, il décéda en 1699 après avoir perdu déjà en 1690 son fils Philippe-Charles, destiné à lui succéder.
Les deux gendres de Wolfgang-Henri partagèrent leur héritage en 1700. Le baron de Kesselstatt obtint les fiefs, les propriétés et les charges au pays de Trèves. Charles-Hugo baron de Metternich- Müllenarck obtint la seigneurie de Bourscheid avec le château pour éviter la vente forcée de son patrimoine de Müllenarck au Duché de Juliers.
La baronne de Schmidtbourg, après avoir obtenu Bourscheid en soutenant de longs procès à Luxembourg, Malines et Ratisbonne, laissa l’administration et la régie de Bourscheid à ses baillis, aux Nicolas et Dominique Laeis, père et fils, qui étaient plutôt entrepreneurs de constructions et négociants, reconstruisant en 1785 la maison de Stolzembourg pour leur propre logis, tout en laissant s’écrouler le château supérieur, c’est-à-dire le Palais et les quartiers des familles Metternich et Zand.. Déjà en 1765, ils avaient construit une nouvelle église au village de Bourscheid avec l’autorisation de la baronne de Schmidtbourg, n’hésitant pas à démolir et faire disparaître totalement les monuments funéraires des anciens seigneurs de Bourscheid qui s’y trouvaient.
Après l’abolition du régime féodal en 1795, le château et les autres biens restés au fils de la baronne de Schmidtbourg, François Joseph Népomucène Ignace Schenck de Schmidtburg, ne pouvant pas tenir son héritage, furent vendus aux enchères en 1812. Deux forêts et les ruines furent acquises par le notaire François-Julien Vannérus de Diekirch.
Ainsi Bourscheid fut cédé en pièces détachées et livré à la démolition pour devenir en quelques mois une ruine complète. A l’exception du donjon et des enceintes, tous les bâtiments s’écroulèrent, transformant une ancienne fortification fière en carrière à bon marché pour les habitants des environs.
En 1880, Ernest Vannérus, fils du notaire F.J. Vannérus, vendit Bourscheid au baron Félix de Blochausen, châtelain de Birtrange, décédé en 1915. Après la mort de son épouse, Estelle de Tornaco de Sanem, en 1935, les ruines de Bourscheid sont passées à son héritière, la baronne Ch. van Delft à Köppenhaff au-dessus de Brandenbourg.
Enfin, par acte, en date du 10 avril 1972, les ruines du château furent acquis par l’Etat luxembourgeois afin de préserver les ruines du délabrement total et irréparable. La conservation des ruines commença immédiatement par la reconstruction de la maison castrale dite de Stolzembourg, des fouilles archéologiques furent menées à fond et finalement les tours des remparts reçurent de nouvelles toitures rendant aux ruines un aspect magnifique et fier.